Plaidoyer pour la liberté de conscience en Haiti

Le 10 août 2018
Office de la Protection du Citoyen
Me. Renan Hédouville
Objet : Dépôt de grief

Monsieur le Protecteur,
Nous vous remercions pour votre intervention. La note de presse du 4-08-2018 / concours université d’État d’Haïti, a répondu à notre lettre ouverte du 25 juillet 2018. Nous vous écrivons ici, dans le but de déposer un grief contre le Rectorat de l’UEH qui a publié une note de presse SG/UEH-12937, en date du 7 août 2018. Cette charge d’intolérances espère, partant de cela, clore un débat qui vise à stopper l’assassinat désormais légitime de l’avenir du jeune haïtien. Quelle maladresse enregistrée au plus haut niveau du temple du savoir haïtien, ou, quelle incohérence devrait-on dire ? Je reprends ici un extrait de votre communication précitée : « de prendre en compte les diverses doléances et revendications relatives à la violation du droit à la liberté à la conscience et de religion ». Sommes-nous réellement en train de tout perdre dans ce pays, quand votre compréhension corrobore la nôtre tandis que l’UEH nous répond par cette note discriminatoire ?

Permettez, Monsieur le Protecteur, l’étalage d’inquiétudes et de frustrations qui suit.
Les faits
1. Le droit à la conscience et à la liberté religieuse est ici violé quand le Rectorat oblige des jeunes, désireux de se former, à participer à un concours d’admission en un jour non conforme à la pratique de leur foi, sous le prétexte de la tradition.
 Quelle incohérence, car la constitution ne saurait faire l’objet d’interprétation particulière. Question : faut-il continuer à mésinterpréter la constitution parce que traditionnellement c’est la norme ?

2. Les Adventistes à ce titre sont d’une religion organisée et certifiée par une charte légale. Et, d’autre part, la Constitution reconnaît le droit à la liberté religieuse, comme élément fondamental dans une société dite laïque, de même que des célébrations politiques sont assises sur une messe suivie d’un te deum officiel dans la grande église.

3. L’unité de communication de l’UEH assimile la religion Adventiste à une secte, dans son paragraphe II et je cite : « aux règles fixées par une secte religieuse particulière ».
 Nous savons combien les sectes font l’objet de suspicion, de tendance généralement caustique d’autant plus que le bras de super chefs qui font l’objet de manipulation est bien connue ici.

4. Il y aurait déjà eu en 1997 pour les épreuves du Bacc, à la suite du spasme métrologique, renvoi des examens le samedi. Et, sur la demande du pasteur responsable de la liberté religieuse à la mission adventiste, cela avait débouché sur l’ouverture le dimanche suivant, pour les élèves adventistes, dans ce même État laïc.

Le droit
1. La Constitution d’une part, le Ministère des Cultes dans son application, d’autre part, reconnaissent la religion comme un acquis de l’État souverain de la République d’Haïti telle que connue à l’ONU.

2. La discrimination religieuse est interdite par la Constitution de la République d’Haïti.
Les appréciations
Elles sont d’ordre traditionnel si l’on se réfère à la note émanant de l’unité de communication du rectorat de l’UEH, elles sont fausses alors, quand la note soulève le caractère sectaire des Adventistes. Nous étalons.
 L’organisation adventiste globale et son université, forment des cadres, des étudiants depuis l’école fondamentale chez nous, dans le respect des lois du pays, des règlements du Ministère de l’Éducation.
L’organisation Adventiste offre des bourses d’études, produit des professionnels, forment des pasteurs qui sont envoyés à travers le monde et représentent une économie appréciable pour le pays.

Les considérations discriminatoires
Elles sont nombreuses mais la considération majeure est du fait de l’énoncé du signataire de l’unité des
communications du Rectorat. Assimiler les Adventistes à une secte puisque le débat lancé, reconnu par le signataire, est étalé jusqu’à votre entité constitutionnelle, légitime de l’État, soit le Protecteur du Citoyen et de la Citoyenne, sur la lettre expresse ouverte signée de Jean Willer Marius.

La note de presse dit en para IV : « aucun jour de la semaine ne conviendrait ».
 Le Rectorat, l’unité de communication ou, le signataire exclusivement ignore dans les faits, que dans
ce pays où pourtant ils y sont installés, qu’il n’y a que (2) jours de culte officiel ?
 Le rectorat tout puissant, évoquant une laïcité mal abordée, utilise justement ces (2) jours pour
organiser les concours officiels d’admission, en soutenant « un problème de sécurité » les autres
jours de la semaine.
 Ceci implique-t-il le fait que l’UEH fonctionne rationnellement dans l’insécurité avec professeurs et
étudiants, pendant la semaine ?
 Mieux, quand l’État laïc lui-même reconnait les degrés universitaires en sciences religieuses pour en
faire des pastorales, des sacerdoces.
Serait-il alors à ce point au-dessus de la Constitution ?

Permettez que je vous rappelle ceci : Chapitre IV, Art 207. « Il est créé un office dénommé OFFICE DE LA PROTECTION DU CITOYEN dont le but est de protéger tout individu contre toutes les formes d’abus de l’Administration Publique ».

L’unité de communication du rectorat de l’UEH est-elle aussi, contre l’avis de l’Office du Protecteur du
citoyen qui y voit là un intérêt allant dans le même sens que nous les Adventistes ?
Permettez, Monsieur le Protecteur, que nous posions les questions suivantes au signataire :
 Voulez-vous alors être le bourreau intellectuel de jeunes haïtiens victimes dans leur propre pays à
cause de leur croyance religieuse ?
 Agissez-vous contre le principe de l’UNESCO, dont Haïti est un membre, et qui prône le respect de la
religion parmi les sciences sociales et la culture ?
C’est d’ailleurs un critère d’admissibilité par-devant la convention sur la demande du statut de réfugié.
 Irez-vous jusqu’à pénaliser cette partie de la population haïtienne qui demande juste une main levée
afin de bénéficier elle aussi, de l’éducation à laquelle elle a droit en accord avec sa conscience ?
 L’égalité de chance pour tous d’après la constitution, de quelle constitution parlons-nous? Celle qui
est modelée sur la déclaration universelle des droits de l’homme ou la pseudo constitution récemment
amendée par l’unité de communication du rectorat de l’UEH ?
Malgré cet effort primaire de la part du signataire, la requête est restée sans réponse. Un fait demeure en outre, la note de presse démontre hors de tout doute que des citoyens, sous le couvert d’une entité religieuse reconnue par le droit constitutionnel et certifiée par le Ministère des Cultes, seront pénalisés par l’unité de communication de l’UEH qui assimile les intervenants adventistes à une secte religieuse particulière, car nous sommes les seuls à notre connaissance, à avoir introduit ce débat.
La personne derrière cette infamie, si elle n’a même pas daigné parapher son nom, est-ce une preuve que le Recteur, du haut de sa compétence prouvée n’approuve pas une telle légèreté dans une question foncièrement républicaine ? En effet, le débat reconnu et cité dans sa communication à l’image de ces grands débats politiques nationaux qui se sont menés dans la société haïtienne et ignorés de la politique au point de conduire notre pays là où nous le savons, dans cette impasse actuelle que nous vivons, est une fois de plus en passe d’être ignoré quand l’UEH reproduit le même exemple.

L’ignorance des débats politiques nationaux a déjà pénalisé les étudiants en général et par la voie de cette nouvelle communication, les étudiants adventistes désormais décrits comme membres d’une secte religieuse particulière, seront doublement pénalisés.
Le concours d’admission est un temps fort dans les activités universitaires, si les autres jours présentent une insécurité telle que le rectorat se sente obligé de le mentionner, pourquoi inviter alors les filles et fils d’Haïti à suivre des cours dans des espaces non sécurisés ?
 Serait-ce l’officialisation du mépris du droit à la vie qui est monnaie courante chez nous ?
 Et qu’est-ce que l’étudiant devait attendre d’un premier ministre désigné qui ignore cet important
débat d’avenir pour le centre névralgique du pays, lequel pays où l’on observe quotidiennement la
fuite de cerveaux tant l’avenir l’incompréhension et l’insécurité se croisent les fers ?
Espérant, Monsieur le Protecteur, que la raison remportera la victoire sur l’appréciation discriminatoire, et, incohérente, ce dans le cadre de votre intervention institutionnelle soutenue, nous déposons.
Veuillez agréer, avec l’expression de ma profonde sollicitude, mes remerciements anticipés.
Jean Willer Marius.

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